Le mode de hiérarchie du chien guidait ma vision du chien auparavant… Je me vois il y a encore quelques années, avec Gouache dans ma clio, de part ailleurs,  j’en profite pour vous dire que c’est une super voiture!
J’allais chez une cliente qui m’avait appelé pour un soucis d’agressivité, maman de deux enfants, le potentiel de risque du chien n’était pas négligeable. J’avais avancé notre rendez-vous en début de semaine, prenant cela en compte.

D’une mauvaise observation

En arrivant, pour établir le « test d’évaluation » (sorte d’état des lieux) avant d’envisager un travail avec le chien… Un gros labrador m’accueillit au pas de porte, me sauta dessus et me poussa de ses antérieurs, tourna sur lui-même, puis s’en retourna faire le tour du salon avant de revenir avec sa balle, s’en aller puis revenir encore et encore… La dame s’excusa timidement et visiblement gênée par cet évènement, tout en m’expliquant que ça faisait partie du problème…

Je lui demandai de mettre le chien dans son jardin, ce qu’elle fit avec grande difficulté…
Puis par la suite, elle aborda un bon nombre de choses relatives à son quotidien autour d’une tisane. J’étais particulièrement attentif à elle, et non pas uniquement porté sur le chien.
Je ne pense pas sortir de mon cadre d’éducateur canin lorsque je cherche à comprendre la personne, tant le lien qui l’uni à son chien est primordial dans la compréhension de celui-ci…

hiérarchie_chien_meute

Étant maman au foyer, elle travaillait à temps complet, s’occupait des enfants, faisait le ménage, et s’occupait également du chien. Je prenais note des petits détails, des idées générales, de ce que je percevais chez le chien et ce que je ressentais dans l’organisation globale. En fait, je trouvais ce jeune chien plutôt jovial, un peu fou-fou, pas délicat, mais étant donné le climat anarchique lié à l’excitation ambiante…. C’était plutôt cohérent.

En effet, je me souviens que j’avais d’ailleurs du mal à entendre ce que me disait ma cliente, la télé était allumée dans la salle d’à côté, les enfants chahutaient, et le chien aboyait dans le jardin où nous avions vue, depuis le salon. La dame, m’expliqua que ça avait été son idée d’avoir ce chien, mais que les choses tournaient au vinaigre lorsqu’elle le sortait à la sortie des classes pour aller chercher ses enfants. Il commençait à grogner, sur les hommes principalement…

La hiérarchie du chien, la fameuse…

Et là, je délivrai mon observation. « Votre chien vous domine. Pensant qu’il est au dessus de vous, il ne vous respecte pas. Il faut inverser la vapeur et reprendre l’ascendant,…Vous devez vous opposer à ses débordements et rétablir la hiérarchie, remettre votre chien à sa place… » (mes yeux saignent en écrivant ces quelques mots…)

Ma perception était basée sur la subordination, induisant un rapport dominant/dominé. Je soutenu qu’à l’instar du loup, le chien avait besoin et devait être régit par des normes hiérarchiques le « sécurisant », dans sa « position inférieure »,qu’il fallait lui faire comprendre qui était le « dominant absolu« en tout instant.

En effet, je me trompais lourdement, aussi bien dans le fond, que dans le contenu explicatif pour étayer mes propos.
Je tiens à préciser aujourd’hui que j’éprouve des regrets pour avoir affirmé à cette dame mon analyse globalement erronée, faisant une analogie inopportune avec son cousin/ancêtre : le loup. Elle ne faisait que coller avec la perception du chien telle que je me la représentais.
Je ne comprendrai vraiment la notion de culture canine que des années plus tard…

Mea culpa

Le chien n’est pas un loup.

Il y a plusieurs théories quant à la provenance du chien. Mais peu importe le degré de proximité qui lie ces deux espèces distinctes l’une de l’autre, ce n’est pas le sujet ici…

Le résultat en est, que le loup n’entre ni dans nos foyers, ni dans mon domaine de compétence. Même s’il me passionne, il n’est reste pas moins un animal sauvage, qui n’a en aucun cas subit une domestication de masse, sauf peut-être sous la forme actuelle du chien. Il y a donc dans cette comparaison chien/loup un profond mépris de la culture canine, de sa culture écologique et sociale. Le loup n’est pas d’avantage respecté à en croire l’effet de mode actuel…

Et c’est une différence de taille. L’Homme fait partie intégrante de l’environnement du chien, ils font d’ailleurs partie d’un même système social, il n’est pas rare d’entendre que le chien de famille, est un membre à part entière de cette même famille. Eh bien vous savez quoi? C’est VRAI!

Un chien dominant?

Dans un environnement  social, un seul être peut-il concentrer tout le savoir-faire, synonyme de « compétences« , et devenir « absolu » en ces termes?

C’est impossible. Pas pour un être social, évoluant avec d’autres individus.
Dans toute organisation, chacun pourra jouer son rôle de part ses compétences.
Celles-ci profitent à l‘ensemble du groupe, et favorisent l’épanouissement de chacun. Il y a donc une notion importante de complémentarité, favorisée par un équilibre entre les individus. Et non pas par un seul individu polarisant toutes les compétences, et assurant sa (lourde) responsabilité quant aux autres membres. Ces derniers, n’ayant pas de fonction attitrées deviendraient donc inutiles à la survie ou bien-être du groupe.

Une hiérarchie du chien, très contextuelle

Exemple 1 : Je suis dans une rue avec mon chien, les voitures représentent un danger constant, je peux me trouver en situation inconfortable si mon chien tire en laisse, ou qu’il tente d’agresser un passant.

Il est évident ici, que ma compétence de compréhension du « monde humain », avec tout ce que cela engendre… me positionne en guide. Tenir mon chien en laisse, pour notre sécurité. Lui demander de rester calme, tout en respectant ses besoins de chien… renifler, marquer le territoire, favoriser dans de bonnes conditions des interactions intra-spécifiques…

Ceci, me confère la compétence présente, et je fais valoir mon point de vue. Cela ne signifie d’ailleurs pas que je me considère comme un dominant au sens absolu et inconditionnel.

Exemple 2 : Je me promène avec mon malinois en forêt. Je me rend compte au bout d’un quart d’heure de marche que j’ai égaré mes clés de voiture (LA CLIO!!!) sur le chemin. Et là, je demande à mon chien de les retrouver. Je le tiens en longe, il n’hésites pas à tirer un peu… J’ai l’appréhension de l’arrêter parce que je sais qu’il est sur la piste, et je ne veux pas prendre le risque qu’il perde le file.
Du coup je m’en remets à lui de manière inconditionnelle. Je lâche cette longe, et finis par voir mon chien s’en aller à toute allure, puis revenir avec les clés en gueule.

En effet, mon équipement sensoriel inférieur ne me permet pas de surpasser celui de mon chien.
Qui dominera l’autre en cet instant? Qui possède ici la compétence principale, présente et relative à l’exigence de la situation?

La compétence situationnelle

Et pourtant, même si ces deux illustrations restent très parlantes. Serait-ce juste, d’imaginer que mon chien veuille me dominer, alors qu’il m’aide? Il possède simplement la compétence propice à la situation. Et apprécie très probablement que je m’en remette à lui.

Avant de penser en terme de dominant/dominé, n’est ce pas plutôt une interaction où les deux partis se retrouvent gagnants? Mon chien adore pister, parce que cela représente une activité ludique où il est valorisé pour ses aptitudes et son travail.

De mon côté, j’ai la satisfaction de retrouver mes clés, grâce à mon chien. Cette expérience qui était négative ce matin là, s’est très vite retrouvée extrêmement positive en fin de compte. Notre relation s’en retrouve renforcée. Lorsqu’il s’agit de lien, et de coopération (même si les enjeux sont différents pour nous deux, je ne nie pas sa culture canine…), je doute à l’heure actuelle, que la notion de dominance hiérarchique s’impose. La compétence sera étroitement liée aux spécificités du contexte.

Le masque de la hiérarchie du chien

Pourquoi ne pas envisager une relation basée sur l’affectivité? En s’éloignant de l’animal objet, qui n’a que pour fonction ultime :  flatter l’égo de celui qui le commande?

Je pense aujourd’hui qu’une réelle remise en question s’impose. En effet, je vois régulièrement des chiens victimes de troubles comportementaux, phobiques, victimes d’inadaptation en somme… Car inadaptés au monde, incapable d’autonomie, ou d’initiative et incapables d’actes non-conditionnés. Parce qu’on les en prive! Des chiens contenus dans une relation purement hiérarchique. Des chiens qui allaient à l’école du chiot, puis au club canin pour apprendre à obéir sans réfléchir… Et qui malgré les efforts des « maîtres » se retrouvent simplement « conditionnés » à une situation connue… La relation devient alors un rapport de force, où la connivence n’a pas toujours sa place en dehors du foyer.

Hiérarchie du chien, un mythe?

Certains éducateurs canin tendent à dire que la hiérarchie chez le chien de famille est inexistante envers l’humain. Et effectivement, je ne pense pas qu’elle puisse se traduire par les même codes qu’avec leurs congénères.
Néanmoins, je l’estime bien réelle, et cela n’engage que moi à l’heure actuelle.
En favorisant l‘autonomie du chien, contraire de l’action (ou réaction) conditionnée de ce dernier

  1. Que ce soit en « mauvais-positif » par l’usage de leurres,(ex:la ba-balle!)… qui excitent le chien et altèrent ses phases comportementales (signal d’arrêt entre autre…).
  2. En induisant un rapport marchand avec le chien, cas de la nourriture, l’humain devenant pourvoyeur de ressource alimentaire…
  3. Pire encore, par l’usage de moyens coercitifs (type : collier étrangleur – Pardon Gouache).

hiérarchie_chien_enfant

…,il est possible d’obtenir de cette relation basée sur l’autonomie et la proposition, un chien qui saura s’adapter à l’inconnu en collaboration avec son humain. Pour prendre des initiatives, basées sur sa propre expérimentation, validée ou non par celui qui décidera de la suite des évènements (souvent l’humain).

…en bref!

J’en arrive à la conclusion, que non seulement la compétence prime, mais que cette « hiérarchie » est évolutive en fonction du contexte. Elle ne prendra d’ailleurs pas la même forme dans une communication entre chiens, ou avec un humain.

Je pense que nous avons chacun nos rôles à jouer dans notre organisation sociale. Ces rôles doivent correspondre à des traits de caractère et aptitudes individuelles. Doivent être mesurés, appropriés et appréciés pour ce qu’ils sont. Ensuite, il convient au décideur (humain) d’accepter, renforcer ou refuser tel ou tel comportement.  Il est également nécessaire de ne pas s’approprier une fonction qui n’est pas la sienne, aussi bien pour l’humain que le chien.

Un respect de la culture canine devient nécessaire, et même une évidence, lorsqu’on passe d’un modèle hiérarchique à un fonctionnement basé sur l’observation, la coopération et la relation affective qui sera le fondement permettant un lien de qualité entre ces deux individus complémentaires l’un à l’autre.

Catégories : Penser son chien

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